Gravitant autour de l’Union des femmes peintres et sculpteurs, créée en 1881 par Hélène Bertaux (1825 – 1909), de nombreuses jeunes femmes artistes parfois formées auprès de mêmes maîtres complètent leur formation en fréquentant mutuellement leurs ateliers respectifs, pour se perfectionner dans telle ou telle technique. En effet, l’école des Beaux-Arts leur est interdite, et ne leur ouvrira progressivement ses portes qu’à partir de 1897 !
L’artiste tchèque Eugénie Sommer par exemple monte à Paris se perfectionner au portrait et réalise en 1890 celui de Mathilde sans doute élève du même cours; Mathilde Delattre réalise celui de Jeanne Tournay, sa condisciple auprès de Gaston Casimir Saint-Pierre et Henry-Eugène Delacroix. Jacqueline Vermandel est élève en 1930 de Mathilde Delattre mais aussi d’Ysabel Minoggio-Roussel… elle même ancienne élève de cette dernière ! Après 1900, Mathilde Delattre se perfectionnera quant à elle auprès de Ferdinand Humbert, a qui l’on a confié le nouveau cours – exclusivement féminin – des Beaux Arts. Les artistes femmes s’hébergent également mutuellement, à l’occasion des Salons, ou d’amitiés plus durables.

L’atelier Humbert aux Beaux-Arts, carte postale d‘Ernest le Deley
Au Salon de l’Union, la critique distingue les « anciennes » des plus jeunes, ainsi en 1930: « Les talents de Mesdames Galien-Berthon et Routchine-Vitry, de Mademoiselle Delattre ont contribué au succès du Salon; il convient aussi de noter l’enthousiasme des jeunes (…): les aquarelles de Mademoiselle Jacqueline Vermandel ont été particulièrement remarquées » (Le Carnet de la semaine, 2 mars 1930).
Nous présentons ici quelques oeuvres d’élèves de Mathilde Delattre, dont l’atelier du 17 rue Duperré Paris 9è fut actif jusqu’en 1939, et qui enseigna également jusqu’en 1942 au cours de peinture de la mairie du 17è, oeuvres témoignant de cette communauté artistique. La professeur présentait ses élèves dans les différentes sociétés dont elle faisait partie (Société des artistes français, Union des femmes peintres et sculpteurs, Société nationale d’horticulture, …) et on ne compte pas moins de 18 de ses élèves exposant au Salon de l’Union en 1914 !


Une oeuvre d’une élève (non identifiée) de Mathilde Delattre; en marge, les conseils de l’enseignante. Fonds Atelier Mathilde Delattre.

Ysabel Minoggio, Jetée de roses et aiguière, aquarelle
Elle expose aux Salons de 1901 à 1939. A partir de 1903, elle devient également élève de la grande aquarelliste Blanche Odin.

Francine Gaudrion (1882-1941), aquarelle.
L’artiste a eu longtemps son atelier voisin de celui de Mathilde Delattre, au 9 de la rue Duperré, Paris 9è ! En 1936, une autre peintre, Andrée Levy, y est (également) domiciliée.

Francine Gaudrion, aquarelle.
Comme pour Ysabel Minoggio (ci-dessus), l’oeuvre de l’artiste évolue, à partir de classiques aquarelles, vers des natures mortes aux formes plus « art déco ».

Yvonne Meley, Portrait d’un homme au turban, pastel, Salon de l’Union 1907. A comparer à un portrait à l’aquarelle d’homme oriental attribué à Mathilde Delattre.

Marie Clotilde Berton (1870 Constantine – 1959), Jeune fille berbère
Mathilde a-t-elle évoqué avec son élève Marie Clotilde ses origines orientales ?

Marie Clotilde Gallien-Berthon, Nature morte aux fleurs

Marie Pertué, Bouquet de dahlias, 1900, huile 162 cm x 87 cm (lot d’enchères)
Elle fut comme Mathilde Delattre, dont elle fréquenta ensuite l’atelier, élève de SaintPierre et Delacroix. Sociétaire des artistes français depuis 1897.

Paule Collas-Primer (auction New York 2022)
Mention Honorable au salon de 1938, la critique note alors sa « distinction de palette ».

Germaine Boy (1885- 1971), aquarelle 71 cm x 54 cm

Germaine Boy 1920, Saviésanne assise, aquarelle et crayon 20 x 25 cm, vente Drouot
(l’artiste participera à l’école de Savièse)

Suzanne Laigneau-Ernault, Bouquet de fleurs aux livres anciens

Madeleine Caudel, Pins parasols à saint-Tropez, huile

Madeleine Caudel, Pont ensoleillé au dessus d’une rivière, huile 60 cm x 80 cm

Louise Alix (1888-1980), huile sur toile

Louise Alix (1888-1980), deux aquarelles
Louise Alix fit également une carrière des plus honorables avant de tomber dans l’oubli; ses oeuvres récemment redécouvertes à la suite d’une succession refont surface depuis 2024. On retrouve bien dans ces « jardins fleuris » et leurs éclairages doux une approche très « delattrienne » !

Quant à Yvonne Blanchon, amie de Louise Alix, elle fait évoluer ses compositions florales dans un intéressant « art déco ». Ses oeuvres viennent d’être redécouvertes (2024) dans la même vente, témoignant vraisemblablement de la proximité familiale des deux artistes.