L’atelier du 17 rue Duperré, Paris 9è
En 1895, Mathilde Delattre quitte le 16è avec sa mère et son frère pour habiter au 17 rue Duperré dans le 9è arrondissement, quartier urbanisé au début du XIXè siècle avec la construction d’immeubles de rapports, « bas Montmartre » qui a déjà attiré des centaines d’artistes. Elles sont locataires aux 5è et 6è étages de l’immeuble, et Mathilde dispose d’un grand atelier sous verrière.


A gauche, le plan en élévation de l’immeuble construit en 1857 prévoit les ateliers d’artistes; à droite Mathilde Delattre vers 1900 rue Duperré, décorant de la céramique. Noter au premier plan un des grands samovars rapportés d’Egypte par sa mère.
Peut-être les adresses féministes de la rue Duperré ont-elles également joué un rôle dans le déménagement de Clémentine et sa fille à cette adresse: un « Ladies-club » s’y ouvre au 14 en 1896, lieu où seules les femmes sont admises, club familial et restaurant féministe. Il est fréquenté par Marguerite Durand, fondatrice en 1897 du journal La Fronde, premier journal français à avoir été entièrement dirigé par des femmes, et qui paraîtra de 1897 à 1930. On y donne également des conférences de philosophie hindoue, auxquelles Mathilde Delattre n’est sans doute pas indifférente, elle qui fera activement partie d’une «société spiritualiste». Par ailleurs, l’école professionnelle pour femmes créée par Elisa Lemonnier est transférée en 1882 au 24 rue Duperré, et la belle soeur de Mathilde, Emilie Delattre-Rifault (cf. portrait plus haut) y enseigne avant d’en devenir directrice.
L’installation rue Duperré est associée au nouveau départ de l’artiste dans les Salons: Mathilde peint, Clémentine gère l’atelier, Mathilde expose en 1895 à la Société des Amis des Arts de la Seine-et-Oise au château de Versailles (dont elle est médaille d’argent en 1897), elle expose sa première nature morte à Roubaix-Tourcoing en 1896, ses premiers portraits en 1897 au SAF et à l’UFPS, les salons «de ses maîtres», donc, où elle ne cessera plus dès lors d’accrocher chaque année jusqu’à la seconde guerre mondiale, ainsi que dans de nombreux autres lieux, à la Société Nationale d’Horticulture de France, à la Société de la Miniature et de l’Aquarelle, en province, etc…

Elle ouvre en 1905 son propre atelier au 17 rue Duperré, où elle aura dès lors une importante activité de professeur d’aquarelle. Elle se fournit en couleurs et fait encadrer non loin, à la maison Cluzel, un des ‘ »encadreur des impressionnistes », au 33 rue Fontaine. Raoul Saisset, son voisin du 4è, est photographe. D’autres artistes habitent la rue, dont Gabrielle Debillemont-Chardon, vice-présidente puis présidente de l’Union, qui donne en 1910 des cours de miniature avec modèle vivant au n°7; les époux Muraton sont au 17 (Euphémie Muraton sera parmi les 30 peintres françaises de l’Exposition Universelle de Chicago en 1893). Au n°9 habitera en 1936 Francine Gaudrion, élève de Mathilde Delattre.